« Silence, on tourne... » Le cinéma face à ces monstres

QUAND LE CINÉMA PROTÈGE SES MONSTRES
Gérard Depardieu, monstre sacré du cinéma français, a été condamné pour des agressions sexuelles, après des années de polémiques. Ce n'est pas un cas isolé. Harvey Weinstein, Roman Polanski, Kevin Spacey... Le septième art a trop souvent fermé les yeux sur l'inacceptable. Pourquoi ce monde si prompt à dénoncer les injustices à l'écran est-il si lent à les affronter hors caméra ?
UN CAS « À PART » ?
Et si ce n'était qu'un cas, une exception, sauf que non, comme on a pu le découvrir avec le #MeToo, ces drames sont bien plus courant. Harvey Weinstein, producteur tout-puissant d'Hollywood, a été condamné pour viol en 2020. Mais il aura fallu des dizaines de témoignages, relayés par des médias internationaux, pour que la justice se saisisse de l'affaire. Et Polanski ? Toujours acclamé dans les festivals malgré une condamnation pour viol sur mineure en 1977.
« ON NE JUGE PAS UN ARTISTE, ON JUGE UNE ŒUVRE. »
Combien de fois a-t-on entendu cette phrase ? Elle résonne comme un réflexe de protection, presque sacré, autour de ceux qui ont marqué notre imaginaire. Gérard Depardieu, c'est Cyrano, Jean Valjean, Obélix. Il incarne une France du cinéma populaire, excessive, "authentique". Mais derrière le génie, des témoignages glaçants s'accumulent. Trente femmes ont récemment pris la parole dans une enquête de Mediapart (février 2024), dénonçant des agressions sexuelles ou des comportements déplacés. Certaines remontent aux années 1980, d'autres sont bien plus récentes. Peut-on encore séparer l'homme de l'artiste ? C'est la question qui divise. Peut-on apprécier un film sans cautionner la personne qui l'a réalisé ou incarné ? Faut-il interdire la diffusion de leurs œuvres ? La censure est-elle une solution, ou un piège ? Il n'y a pas de réponse unique ou parfaite, mais un impératif : écouter les victimes, et refuser de les faire taire au nom de l'art.
ET MAINTENANT ?
L'acteur n'était pas présent pour le verdict, il était en tournage pour un prochain film. Cette énigme affaire ne suffit donc toujours pas à changer les choses, mais à défaut, elle a mis en lumière cette triste vérité du 7e art. Le cinéma, c'est aussi une industrie de rêves. Il est temps qu'elle cesse de produire des cauchemars.

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